Les César, une cérémonie et des affaires

ven, 28/02/2020 - 17:52

 

 

Alain Terzian, le président déchu de l'académie des César. ©Martin Bureau

Texte par :RFI

Ce vendredi 28 février au soir à Paris, salle Pleyel, se tiendra la 45e cérémonie des César. Cette année, la fête du cinéma français promet d’être sous tension après la démission de la direction de l'académie, de son président Alain Terzian, et alors que les douze nominations du J'accuse de Roman Polanski suscitent colère et indignation.

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Soirée à haut risque pour les César. La grande fête du cinéma français risque d’être quelque peu chahutée cette année. Par les féministes d’abord : indignées par les douze nominations du film J’accuse de Roman Polanski, réalisateur franco-polonais visé par une nouvelle accusation de viol, plusieurs associations ont appelé à manifester devant la salle Pleyel.

Mais les César sont aussi affaiblis par une crise inédite qui a conduit mi-février à la démission collective de la direction de l'académie, accusée d'opacité et d'entre-soi. 600 personnalités du cinéma, dont Omar Sy, Jacques Audiard ou Céline Sciamma, ont signé une tribune réclamant une « réforme en profondeur » pour plus de démocratie. Leur action a précipité la démission du conseil d'administration des César et de son président, le producteur Alain Terzian.

C’est donc une ère nouvelle qui s’ouvre pour l’académie des César avec la nomination d’une présidente par intérim, la productrice Margaret Menegoz, et une réforme des statuts. En attendant, ce soir, la cérémonie sera probablement tendue, possiblement glaciale, à vouloir réunir tout ce beau monde sur un même tapis rouge, rapporte notre journaliste Elisabeth Lequeret. 

Roman Polanski a déjà déclaré qu’il ne viendrait pas. Adèle Haenel, en lice pour le prix de la meilleure actrice, déclarait récemment que distinguer Polanski, « c’est cracher aux visages de toutes les victimes ». Une seule chose est sûre : cette cérémonie, d’ordinaire jugée longue et compassée, va susciter ce soir un énorme regain d’intérêt.

Les votants « doivent prendre leurs responsabilités »

Interrogé aujourd’hui sur France Info, le ministre de la Culture, Franck Riester, a salué une sage décision de la part du réalisateur.

« Ce n’est pas parce qu’on est un artiste, même réputé, même de talent, qu’on a une garantie d’impunité. Il est important de différencier les choses. On voit bien qu’avec ce qui s’est passé depuis de nombreuses années avec un certain nombre de femmes qui ont dit avoir été agressées par Roman Polanski, sa présence ce soir aurait été évidemment une source de tension. »

Est-ce qu’il peut recevoir le César du meilleur film ou du meilleur réalisateur ? Le ministre de la Culture ne l’exclut pas.

« Peut-être qu’il l’aura. Moi j’estime que ça serait un symbole mauvais par rapport à la nécessaire prise de conscience que nous devons tous avoir dans la lutte contre les violences sexuelles et sexistes. C’est à chacun et chacune des votants, peut-être qu’ils l’ont fait ou pas, de prendre ses responsabilités .»

Une tribune pour la diversité

C'est également dans ce contexte qu'une trentaine de personnalités du septième art, réalisateurs et acteurs, réclament dans une tribune une meilleure représentation des acteurs issus de l'immigration et de l'Outre-mer dans le cinéma français, rapporte notre journaliste Sophie Torlotin.

En l'an 2000, lors de la cérémonie des César, Luc Saint Eloy, comédien né à Djibouti, et Calixte Beyala, romancière franco-camerounaise, réclament la visibilité, l'inclusion, des acteurs et actrices de couleur.

Vingt ans plus tard, rien n'a changé. L’acteur Eriq Ebouaney a initié une tribune parue dans Le Parisien, signée par des dizaines de personnalités d'Aïsa Maiga à Matthieu Kassovitz, pour dénoncer les rôles secondaires ou stéréotypés auxquels sont cantonnés les acteurs issus de l'immigration.

« On a bien eu un débat autour de la parité donc celui de l’inclusion doit avoir lieu, explique Eriq Ebouaney. Je pense qu’il faut prendre conscience qu’il n’y a pas suffisamment d’enfants issus de l’immigration, Afrique, Asie et d’Outre-mer dans les professionnels du cinéma. »

L’acteur espère désormais que le renouvellement de la direction de l'Académie des César permettra d'y inclure des artistes représentant la diversité de la population française

► À écouter: La productrice française Sandrine Bauer