Le Point Afrique - Ce paquet financier fait partie des mesures prises par la BAD pour répondre à la pandémie. Elle sera accordée à la fois aux gouvernements et au secteur privé. L'heure est grave.
Alors qu'il est encore trop tôt pour évaluer l'impact qu'aura le coronavirus sur le plan sanitaire, on sait d'ores et déjà que la majorité des pays du continent va en pâtir économiquement. Sur le front, la Banque africaine de développement (BAD) a décidé de passer à l'action en prenant plusieurs mesures importantes.
Dernière initiative en date : la création d'un fonds de 10 milliards de dollars qui doit aider les pays africains à lutter contre le coronavirus. Une « mobilisation exceptionnelle », commentent la plupart des capitales africaines, au lendemain de cette annonce.
Dans le détail, ce « fonds est doté de 5,5 milliards de dollars pour les opérations souveraines dans les pays membres de la Banque et de 3,1 milliards de dollars pour les opérations souveraines et régionales via les pays du Fonds africain de développement […]
Un montant supplémentaire de 1,35 milliard de dollars sera consacré aux opérations du secteur privé », selon le communiqué de la Banque, dont le siège se trouve à Abidjan. Les gouvernements tout comme les acteurs du secteur privé pourront y recourir.
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Une manne financière qui tient compte des problèmes budgétaires
Il faut souligner que cette enveloppe a la particularité de tenir compte des difficultés budgétaires que rencontrent actuellement de nombreux pays du continent. Obligés de procéder à des réajustements budgétaires, certains ont déjà demandé de l'aide internationale.
Le président nigérien Mahamadou Issoufou a réclamé un « plan Marshall » pour l'Afrique alors que le Premier ministre éthiopien, Abiy Ahmed, a demandé en mars au G20 d'alléger la dette des économies les plus vulnérables et de préparer un plan d'aide financière d'urgence d'une valeur de 150 milliards de dollars.
En effet, bon nombre de pays africains tirent leurs recettes d'exportation des produits de base. L'effondrement des prix du pétrole a plongé les économies africaines dans la détresse.
Selon les Perspectives économiques en Afrique 2020 de la BAD, ces économies ne sont tout simplement pas en mesure de répondre à leurs engagements budgétaires qui ont été établis sur la base des prix du pétrole en vigueur avant l'épidémie de coronavirus. « L'Afrique est confrontée à d'énormes défis budgétaires pour agir efficacement face à la pandémie de coronavirus.
La BAD déploie toutes ses capacités de réponse à l'urgence pour aider l'Afrique en ce moment critique. Nous devons protéger des vies. Ce fonds aidera les pays africains dans leurs efforts pour contenir la propagation rapide du Covid-19 », avance pour sa part le président de la BAD, Akinwumi Adesina.
Vers une récession en Afrique ?
Selon plusieurs études (Finactu, Union africaine) parues ces dernières semaines, dont le dernier rapport de la Banque africaine de développement, le Covid-19 pourrait entraîner une baisse du PIB, allant de 22,1 milliards de dollars à 88,3 milliards de dollars d'après le scénario catastrophe, soit une contraction des prévisions du PIB pour 2020 de 0,7 à 2,8 points. Si la situation actuelle persiste, l'Afrique pourrait même tomber en récession cette année.
En l'état, le choc du Covid-19 réduira davantage la marge de manœuvre budgétaire du continent, étant donné que les déficits budgétaires devraient se creuser de 3,5 à 4,9 points de pourcentage et augmenter le déficit de financement de l'Afrique de 110 à 154 milliards de dollars supplémentaires en 2020.
Les estimations de la Banque indiquent que la dette publique totale de l'Afrique pourrait augmenter, de 1 860 milliards de dollars en fin 2019 à plus de 2 000 milliards de dollars en 2020, contre une prévision de 1 900 milliards de dollars dans un scénario sans pandémie. Selon un rapport établi par la Banque au mois de mars 2020, ces chiffres devraient atteindre 2 100 milliards de dollars en 2020 dans le scénario catastrophe.
Il y a deux semaines, la Banque avait émis un emprunt obligataire social, « Combattre le Covid-19 », d'un montant record de 3 milliards de dollars, soit le plus grand emprunt social libellé en dollars américains émis sur le marché international des capitaux, rappelle le communiqué.
« Nous vivons une époque exceptionnelle, où nous devons prendre des mesures audacieuses et décisives pour sauver et protéger des millions d'Africains. Nous sommes engagés dans une course pour sauver des vies et aucun pays ne sera laissé pour compte », a assuré le président Adesina.
Aussi, la semaine dernière, le conseil d'administration de la Banque africaine de développement a approuvé le décaissement d'une somme de 2 millions de dollars sous forme d'aide d'urgence en faveur de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), pour le renforcement de sa capacité à aider les pays africains à maîtriser la pandémie du Covid-19 et à en atténuer les effets.