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Amadou Gon Coulibaly, Premier ministre de Côte d’ivoire et candidat désigné du Rassemblement des Houphouëtistes pour la Démocratie et la Paix (Rhdp) est décédé hier mercredi dans l’après-midi à l’âge de 61 ans. Il avait été adoubé par Alassane Ouattara et plébiscité par la coalition réduite à l’état de bric et de broc, amputée des partisans de Guillaume Kibagfori Soro, ex-chef rebelle, ex-Premier ministre, exPrésident de l’Assemblée et candidat à la présidentielle, si la justice ivoirienne ne lui barre pas la route.
Alassane Ouattara en annonçant qu’il ne se présentait pas à un troisième mandat et en choisissant Amadou Gon Coulibaly comme son successeur désigné ne le savait-il pas condamné et dans le meilleur des cas, inapte à battre campagne ? Espérait-il cette fatalité pour revenir sur son retrait conditionné par celui des gens de sa génération, tels Henri Konan Bedié et Laurent Gbagbo, sommés de laisser la place à une nouvelle génération par le parrain d’Amadou Gon Coulibaly, son fidèle lieutenant de 30 ans ? L’élection présidentielle prévue le 31octobre prochain pourrait être reportée. Entre la période de deuil qui s’ouvre dès après les funérailles nationales, on ne voit pas trop Alassane Ouattara et le Rhdp se lancer dans des manœuvres susceptibles d’affaiblir davantage la majorité présidentielle effritée et bien éprouvée.
La démission et le positionnement dans les starting blocks de la course à la présidentielle de cet autre compagnon de 30 ans, Marcel Amon-Tanoh, ancien directeur de Cabinet et ministre des Affaires étrangères, dès l’annonce du choix de Gon pour porter les couleurs du Rhdp pose autrement la question des options offertes à l’actuel chef de l’État ivoirien. Tanoh comme Gon sont du sérail houphouëtiste, allaité au biberon du parti démocratique de Côte d’Ivoire, section du Rassemblement démocratique africain (Pdci- Rda) fondé par le père de la nation ivoirienne, le Président Félix Houphouët Boigny .Tous deux sont issus de l’aristocratie régnante, chaperonné par un cacique parmi les caciques, l’ancien Président de l’Assemblée nationale ivoirienne, Philippe Yace, compagnon de la première heure d’Houphouët Boigny. Troisième prétendant à la succession d’Alassane Ouattara, l’ancien ministre de l’Enseignement supérieur, le Dr Albert Mabri Toikeuse, à la tête de l’Union pour la Démocratie et la Paix en Côte-d’Ivoire ( Udpci), parti de l’ex président putschiste, le général Robert Guei. Il a été candidat à la présidentielle de 2010, recueillant moins de 3% de suffrages avant de rejoindre le Rassemblement des Houphouëtistes censés barrer définitivement la route à Laurent Gbagbo et aux siens.
Estimant son tour venu, à la suite de Ouattara et de Bedié, tous deux ayant occupé la fonction présidentielle, il refusera ouvertement de cautionner le choix de Gon, qui ne pouvait même pas se prévaloir du statut de chef de parti, au moment de sa désignation comme dauphin. Il refuse ostensiblement de se lever pour acclamer le candidat de Ouattara, comme le demande le patron du parti et du pays, sachant que son sort était scellé. Il sera débarqué du gouvernement Gon au mois de mai dernier. Le Premier ministre évacué d’urgence à Paris pour y subir une deuxième intervention du coeurla Présidence ivoirienne annoncera faussement un «contrôle médical», c’est le sémillant ministre de la Défense Hamed Bagayokho (HBK), en embuscade, qui assure l’intérim. Il est présenté comme un patron des francs-maçons ivoiriens, ce qui pourrait peser dans la balance, si cela est avéré. HBK est également crédité d’avoir sécurisé le pays, ce qui était improbable avec l’instabilité que la Côte d’Ivoire a connue.
L’ancien ministre des finances et président de l’Assemblée nationale, sous Gbagbo, l’économiste Mamadou Coulibaly s’est positionné depuis longtemps comme prétendant à la présidence de la République de Côte d’Ivoire. Avec la candidature annoncée de Bedié, celle probable d’un poulain de Gbagbo, Ouattara fera-t-il marche arrière pour s’y coller, espérant ainsi sauver les meubles en assurant lui-même une transition forcée ? Une autre façon d’assurer ses arrières, en attendant des moments plus propices avec un nouveau dauphin crédible et sûr, lui qui a fait claironner qu’il n’avait pas de plan B à la candidature de Gon..?
Plus prosaïquement l’État de Côte d’Ivoire, son chef, l’alliée primordiale, la France et leurs services pouvaient-ils ignorer le bulletin de santé du Premier ministre, le pronostic vital de ses médecins français ? Il se susurre, dans certains milieux au fait des méandres de la politique africaine, ivoirienne en particulier, que Ouattara, en mobilisant son gouvernement et sa famille à l’accueil du Premier ministre-candidat, à son retour de France, avait voulu lui rendre un dernier hommage de son vivant. Le fait est inhabituel, dans les pratiques politiques en Afrique, voire dans le monde. Cet accueil d’un Président à son Premier ministre alors que l’usage consacre plutôt l’inverse constitue une première remarquable et remarquée. D’où l’interrogation sur les véritables motivations du Président ivoirien en choisissant Gon Coulibaly qu’il savait bien malade et en fin de parcours.
Décidément, sur les bords de la lagune Ebrié se joue le destin d’hommes et de femmes dont l’issue impactera fatalement l’équilibre du pays et celui de la sous-région. La France est depuis toujours à la manœuvre, sous le regard perplexe de la partie anglophone de la CDEAO mais aussi des pays ayant battu une monnaie nationale, en dehors de la zone CFA. Au total, les Ivoiriens ont toujours du mal à solder l’héritage de Felix Houphouët Boigny, le crocodile de Yamoussokro, qui semble leur faire un ultime pied de nez. D’outre-tombe où le rejoint le fidèle et loyal Gon, dernière victime en date de la guerre des héritiers. On en oublierait que la Côte d’Ivoire compte bien un vice-président. Un joker !
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kgb