Le premier policier de la République en tournée à l’intérieur du pays : Avec quel(s) message(s) ?
07 October, 2021 - 01:39
Mohamed Salem Ould Merzoug, ministre de l’Intérieur et à ce titre premier policier de la République, effectue, depuis jeudi dernier (30 septembre), une tournée à l’intérieur du pays. Arrivé en costard et jet privé dans la capitale du Guidimakha, ce ministre considéré comme le PM bis du gouvernement d’Ould Ghazwani, omniprésent depuis la COVID19,veut« s’enquérir de la situation des citoyens », écrit l’AMI. Et de conférer en cet objectif avec les autorités administratives, sécuritaires et les élus locaux du Guidimakha, du Gorgol et du Brakna, les deux autres régions que visitera le ministre.
Intervenue au lendemain des évènements dits de R’Kiz où des services publics ont été vandalisés par des citoyens mécontents et frustrés des coupures récurrentes d’eau, d’électricité et d’autres services, cette visite apparaît comme une reprise en main. Elle rappelle que l’État est là et que force doit rester à la loi. Ce qui s’est passé à R’kiz sonne en écho aux incidents similaires que les localités de Kobenni et Timbédra ont connus, il y a quelques mois. Les uns et les autres ressemblent fort à l’expression d’un ras-le-bol des gens. En plus des problèmes d’eau et d’électricité, les populations souffrent de la cherté de la vie, avec des prix qui ne cessent de grimper, en dépit des mesures prises par les autorités. Ils se sentent aussi délaissés par une administration locale beaucoup plus occupée à son « business » qu’aux préoccupations de ses administrés, les abandonnant en conséquence aux tracasseries des forces de sécurité. Ils se sentent aussi délaissés par leurs élus dont la grande majorité vit à Nouakchott. Alors qu’on chante « une administration doit être à l’écoute des populations », on leur colle – dans certaines régions en tout cas – des walis, des préfets et des chefs d’arrondissement qui ne parlent même pas les langues locales et restent souvent inaccessibles…
Il faut reconnaître qu’on ressent, depuis des années, comme une espèce de « relâchement » de notre administration. Sous Ould Abdel Aziz, la territoriale a été vidée de son contenu, voire de ses prérogatives. C’est pourquoi les citoyens de Nouakchott tiennent-ils régulièrement des sit-in devant la présidence de la République, exprimant leur mécontentement et réclamant l’intervention du Président. Une « déliquescence » qui a touché les autres services décentralisés dont les responsables se soucient, eux aussi, beaucoup plus de leurs « poches » que des problèmes des citoyens. Clientélisme, népotisme, gabegie, voire incompétence ont souvent été utilisés pour caractériser l’administration mauritanienne. Pour en redorer le blason, le ministre de l’Intérieur a reconnu que seul un État fort, par la loi et le Droit, peut garantir la paix, le développement et la stabilité. Pour cela, ajoute-t-il, « il faut que chacun assume pleinement ses responsabilités, travaille de manière coordonnée, et veille à la réalisation des prestations requises par le public dans les différents services de l’État ». Un sacré challenge pour le gouvernement. Le dialogue politique qui doit évoquer, entre autres, la bonne gouvernance pourrait aider à sortir notre administration de sa léthargie.
Autre souci des autorités mauritaniennes, la sécurité et l’immigration clandestine en provenance de l’Afrique de l’Ouest via la frontière malienne, une zone particulièrement sensible des trois frontières (Mauritanie, Sénégal et Mali). Aussi le ministre de l’Intérieur a-t-il visité le Centre de coordination de la lutte contre l'immigration clandestine à Sélibaby, construit dans le cadre du partenariat entre notre pays, l'Organisation internationale pour les migrations et l'Union européenne.
A Kaédi et à Aleg, Ould Merzoug a tenu sensiblement le même discours teinté de fermeté. Une reprise en main qui ne dit pas son nom ? Ou un message adressé à ceux qui croient que le pouvoir fait preuve de laxisme et n’est pas capable de montrer ses muscles quand la situation l’exige ?
Dalay Lam