Après le double attentat, Angela Merkel dénonce le « poison » du racisme en Allemagne
Le Monde - Angela Merkel a fustigé jeudi 20 février le « poison » du racisme en Allemagne après les attentats qui ont fait neuf morts à Hanau, près de Francfort, liant cet acte à d’autres attentats d’extrême droite commis dans le pays.
« Le racisme est un poison, la haine est un poison. Et ce poison existe dans notre société, depuis les actes de la NSU jusqu’au meurtre de Walter Lübcke et aux assassinats de Halle », a déclaré la chancelière, évoquant respectivement la série de meurtres et d’attentats d’un groupuscule néonazi dans les années 2000, le meurtre en juin dernier d’un élu pro-migrants, puis l’attaque visant une synagogue qui a fait deux morts en octobre.
Mme Merkel avait un peu plus tôt annoncé qu’elle annulait son déplacement prévu dans la journée à l’académie des sciences de Halle (Saxe-Anhalt).
« Nous nous opposons avec force et détermination à tous ceux qui tentent de diviser l’Allemagne », a-t-elle ajouté, insistant sur « les droits et la dignité de chaque personne dans notre pays », sans distinction « d’origine ou de religion ». Reconnaissant qu’il était « trop tôt » pour faire toute la lumière sur ce crime, « il y a de nombreuses indications selon lesquelles l’auteur a agi mû par des idées d’extrême droite, racistes, par haine contre des personnes d’origine, de croyance ou d’apparence différentes ».
Mercredi soir, un homme a ouvert le feu dans deux bars de Hanau, tuant neuf personnes et faisant plusieurs blessés. Un crime probablement « xénophobe » selon le parquet fédéral, compétent dans les affaires de terrorisme, qui s’est saisi de l’enquête. Le suspect, Tobias R., a été retrouvé mort jeudi matin à son domicile aux côtés d’un autre corps sans vie. Un manifeste et une vidéo dans lesquelles il évoque des « peuples à éliminer » ont par ailleurs été découverts.
« L’AfD est le bras politique du terrorisme d’extrême droite »
Les réactions politiques s’étaient multipliées dans la matinée de jeudi. « Je suis horrifié, bouleversé et sans voix », a commenté le conservateur Volker Bouffier, le ministre-président (CDU) de la Hesse, tandis qu’a été annulée la session prévue jeudi au Parlement régional, situé à Wiesbaden. « Quel crime atroce ! Trop longtemps nous avons hésité à appeler les choses par leur nom : le terrorisme d’extrême droite en Allemagne », a tweeté la coprésidente du Parti social-démocrate, Saskia Esken.
La présidente de la Commission européenne et ex-ministre allemande Ursula von der Leyen s’est dite « profondément choquée » par les fusillades. Le maire de Hanau a annoncé la tenue d’une veillée en hommage aux victimes, jeudi en fin d’après-midi, ainsi que la mise à disposition d’un registre de condoléances devant l’hôtel de ville. Un rassemblement est également prévu à Berlin en fin de journée devant la porte de Brandebourg.
Certains responsables font clairement le lien entre cette violence et le climat entretenu par le parti d’extrême droite AfD. A l’instar du social-démocrate Michael Roth, secrétaire d’Etat aux affaires européennes :
« Le milieu à l’origine d’actes comme ceux de Hanau se nourrit idéologiquement de fascistes comme Björn Höcke [chef de l’AfD en Thuringe]. La haine de la démocratie, le racisme, l’antisémitisme, la haine contre les Tziganes et l’islamophobie prospèrent sur des terres fertiles. Pour cela, je maintiens ma position : l’AfD est le bras politique du terrorisme d’extrême droite. »
Le Monde avec AFP