La Croix - Le président de la République se rend le 30 juin à Nouakchott pour y rencontrer ses partenaires engagés dans la lutte contre les groupes djihadistes du Sahel. Les succès militaires remportés par la France ces dernières semaines sont menacés par l’instabilité politique qui gagne les États sahéliens.
Six mois après le sommet de Pau, les chefs d’États du G5 Sahel se retrouvent le mardi 30 juin autour d’Emmanuel Macron à Nouakchott, en Mauritanie. Au programme, une réunion bilatérale entre le président français et son homologue mauritanien, suivi d’un huis clos avec les chefs d’État du G5 Sahel, en compagnie du président de la Commission de l’Union africaine, Moussa Faki Mahamat, et de Louise Mushikiwabo, la secrétaire générale de l’Organisation internationale de la francophonie.
Cette rencontre doit s’achever avec la participation de trois chefs d’État européens : Angela Merkel et Josep Conté en visioconférence, Pedro Sanchez en présentiel.
Le sursaut militaire
À l’ordre du jour de cette nouvelle réunion, trois points. Un volet opérationnel, d’abord. Il s’agit de « consolider le sursaut militaire », explique-t-on du côté de l’Élysée. En six mois, la force Barkhane a porté des coups à l’État islamique au Grand Sahara (EIGS) dans la zone des trois frontières, aux confins du Mali, du Burkina Faso et du Niger. Et a éliminé le chef historique d’Al-Qaida au Maghreb islamique (Aqmi), l’Algérien Abdelmalek Droukdal. Ce sursaut, juge-t-on à Paris, aurait porté des « revers sans doute irréversibles à l’État islamique au Sahara ».
Consolider les armées sahéliennes
Mais ces victoires doivent s’accompagner d’une consolidation de l’action des armées sahéliennes. Un objectif maintes fois répété depuis la création de la force Barkhane en 2014. Elle doit passer par l’amélioration de l’équipement de ces armées et la coordination de leurs actions.
Cette dynamique militaire, annoncée par l’Élysée, doit aussi se traduire par une dynamique institutionnelle : le retour de l’État dans les zones reconquises. De ce point de vue, le constat général n’est pas concluant.
Inquiétude de la France
Enfin, l’Élysée exprime son inquiétude quant à la situation politique de ses partenaires, en premier lieu, du Mali et du Burkina Faso. Paris attend des garanties pour « que le contexte politique ne remette pas en questions les avancées militaires ».
« Le Mali doit reconfirmer son engagement dans l’application des accords de paix, dit-on dans l’entourage du président. Des mesures immédiates doivent être prises » pour réunifier l’armée malienne et désarmer les groupes. Les élections législatives du mois d’avril et les troubles qu’elles ont générés dans le pays ont fait passer au second plan les accords de paix. Au Burkina Faso, Paris redoute que l’élection présidentielle de l’automne prochain « remette en cause les engagements de Pau ».
Internationalisation de l’engagement militaire
Parmi les nouveautés attendues, la force Takuba constituée de forces spéciales issues des États membres de l’UE. Cette force est destinée à accompagner les soldats maliens dans le combat face aux djihadistes. Paris espère qu’elle sera pleinement opérationnelle d’ici à la fin de l’année ou au début de l’année 2021.
L’attention des Français est toujours portée sur la zone des trois frontières avec comme priorité, l’élimination de l’État islamique au Grand Sahara. La France accompagne aussi les efforts des pays du Golfe de Guinée : la Côte d’Ivoire, le Togo et le Bénin pour sécuriser leur frontière.
Désaccord
Il reste une divergence importante entre la France et ses partenaires du G5 Sahel : négocier ou non avec les groupes armés. Les pays sahéliens y sont favorables comme le Mali et le Burkina Faso. Mais pas la France. « Pas de négociation avec l’état-major d’Al-Qaida. C’est hors de question », entend-on autour d’Emmanuel Macron.
Par Laurent Larcher