La capitale mauritanienne qui jusque là ne recevait annuellement que quelques crachins, est fortement arrosée en ce mois de septembre. Conséquence, la ville peu préparée, est submergée en plusieurs endroits. En fait ce sont surtout les zones de sebkha et les endroits bas de la capitale qui sont les grandes victimes. Nouakchott patauge et une épidémie de Deng fait des ravages alors que nos politiques sont encore occupés à s’entredéchirer à propos d’un improbable dialogue. Les pouvoirs publics préférant agir dans les zones résidentielles en premier brillent le plus souvent par leur absence. On l’a dit et redit depuis des années : Nouakchott est une ville sale. Et encore que la ville a renoué avec l’insalubrité. S’il est un aujourd’hui un dossier où la nouvelle CUN rencontre beaucoup de difficultés, il s’agit bien celui de la salubrité de la ville ; après la résiliation du contrat de la société française Dragui Transport.
En dépit des cris de détresses et des appels au secours de nombreux quartiers, la réaction des autorités se fait toujours attendre dans les quartiers sous les eaux après les pluies qui se sont abattues sur la capitale. A la Socogim Ps, au 5e, 6e, Basra, Netag, Couva, une partie de Tevragh Zeina, le Ksar, une bonne partie de Dar Naim, Baghdad et dans d’autres endroits de la ville, des eaux verdâtres à noirâtres continuent de pestiférer les lieux. Les habitants, impuissants, attendent le secours des autorités. Ceux qui en temps avaient songé solliciter l’appui des citernes privées, ont vite déchanté devant la cherté de leurs prix (20.000 UM pour une rotation).
Les actions du comité interministériel mis en place pour apporter des solutions à tous ces problèmes se font encore attendre. Des risques d’épidémies sont à craindre avec les eaux nauséabondes qui stagnent. D’ailleurs à ce propos une épidémie sans précédent de Deng fait des ravages. Les centres de santé sont submergés par des habitants de la ville souffrant de cette pathologie. Il faut dire qu’avec des eaux fortement mélangées à celles de fosses septiques, sans compter les ordures, déchets et carcasses d’animaux morts le danger couru est constant.
Ainsi la semaine dernière, les ministres de l’intérieur et de la décentralisation, de la santé et de l’agriculture, respectivement, ont supervisé le lancement à Nouakchott d’une grande campagne de pulvérisation des flaques d’eau stagnantes pour lutter contre les moustiques dans la ville.
Cette campagne, qui englobe les différentes wilayas de la capitale, vise selon eux, à éradiquer les insectes nuisibles dans le but de préserver la santé de citoyens.
En fait, ce que les experts en changements climatiques prédisaient, est entrain de se réaliser sous nos yeux. Des zones entières de la capitale sont exposées à des risques d’inondation et cela a été dit et redit à maintes reprises au cours de colloques, réunions, séminaires et autres mais l’Etat n’a jamais pris les dispositions nécessaires. Le projet de sauvegarde de Nouakchott n’a pas pris en les mesures idoines pour faire face aux problèmes annoncés. Une partie de Nouakchott pourrait à terme être appelée à disparaître et c’est à cela que l’Etat doit réfléchir. Les solutions consistant à des colmatages et autres actions furtives ne sont que des leurres puisque les mêmes problèmes sont connus chaque année. Mais une année très pluvieuse et les dégâts peuvent dépassés toutes les prévisions.
En outre un lieu tel que le marché de la Sebkha réputé pour ses mauvaises odeurs et ses tas d’immondices exposées en plein air barbote en plus dans une eau boueuse noirâtre. Un véritable nid pour toutes les pathologies.
Parmi les pathologies qui peuvent en découler, on note d’abord les maladies hydriques comme les diarrhées aiguës et les dysenteries. Puis, en raison des vents de sable chargés de saletés, les infections respiratoires aiguës sont légions, surtout chez les enfants. Avec des bronchites et même des pneumonies.
« Mais si nous parvenons à maîtriser l’hygiène, la mortalité baissera c’est certain », estime un spécialiste en santé publique. Une gestion pérenne des déchets aurait aussi des répercussions économiques, car la santé coûte très cher aux familles. « L’argent économisé pourrait servir à d’autres choses, comme à l’éducation par exemple ».
Toutefois, force est de reconnaitre que toute action de salubrité de la ville dépend pour beaucoup du comportement de la population. Beaucoup de Nouakchott ont pris la fâcheuse habitude de verser leurs poubelles la nuit dans la rue, si ce n’est pas devant chez le voisin. La rue est devenue un dépotoir pour les ordures ménagères, les eaux usées, les carcasses d’animaux… ! Bref, on balance tout ce que l’on veut de l’autre côté de sa maison. Les murs des bâtisses et les grandes places sont des toilettes à ciel ouvert. On se soulage là où l’on veut sans la moindre gêne au mépris d’un minimum d’hygiène et de respect de l’autrui. De nombreux nouakchottois estiment qu’une place est rendue propre pour qu’on la salisse à nouveau. D’où ce cercle vicieux qui fait que la ville ne peut jamais être propre plus d’une heure. Le mépris de l’hygiène, de la chose publique, de son voisin, de soi même font que la ville est sale à un point inimaginable. Que l’on ne se trompe pas, sans une prise en conscience des populations, toute action risque d'avorter. La Communauté Urbaine, les communes de Nouakchott, les élus locaux, les médias doivent se relayer pour que les nouakchottois apprennent à être et à rester propre. C’est seulement en ce moment que des résultats tangibles pourront être obtenus.
Souleymane Guèye