Déclaration des militants, cadres et dirigeants de l'UFP opposés à la déviation de ligne et à la liquidation du parti

lun, 10/02/2020 - 09:54

 

Kadiata Malick Diallo - Le peuple mauritanien meurtri par la pauvreté et les injustices et habitué à la spoliation de ses droits les plus élémentaires, se nourrit d’espoir à chaque fois qu’un changement s’opère au sommet de l’Etat.

C’est ainsi qu’il a espéré au lendemain du 22 juin 2019, avec le changement de l’homme à la tête du système en place, qu’au moins les problèmes les plus cruciaux auxquels il est confronté trouveront des solutions.

Malheureusement, six mois après, le peuple ne voit rien pointer à l’horizon pour le soulager de ses souffrances et lui ouvrir les voies à une vie meilleure. En effet :

La vie quotidienne des ouvriers, des paysans, des travailleurs en général et même de certaines autres couches sociales épargnées dans un passé récent par le fléau de la pauvreté, continue à être rythmée par la cherté des prix des denrées de première nécessité, conjuguée avec la stagnation des revenus ;

Le maintien de la suspension de l’exercice des libertés syndicales, depuis l’interdiction de l’élection des délégués du personnel, en décembre 2014, et le blocage, entre autres, des possibilités d’amélioration des revenus des travailleurs qui en découle ;

La persistance et l’aggravation du chômage, plus particulièrement des jeunes et des femmes et la précarité de l’emploi pour ceux qui en trouve ;

Le maintien du niveau scandaleux des retraites, qui par ailleurs ne peuvent connaître aucune évolution ;

Les libertés d’expression, de réunion et de manifestation garanties par la constitution, continuent à être bafouées, y compris par la répression brutale (répressions récentes du mouvement revendicatif étudiant). La présente conférence de presse, organisée suite à l’interdiction par l’Administration du meeting de la citoyenne et députée Kadiata Malick Diallo, avec le refus de signifier comme le prévoit la loi, cette interdiction par écrit, illustre parfaitement ce piétinement ;

La persistance des restrictions de liberté, infligées à des hommes d’affaires maintenus en exil et à des journalistes ;

L’absence de toute protection face à l’insécurité grandissante dans les centres urbains, plus particulièrement dans les quartiers abandonnés à leur sort depuis plusieurs années ;

La persistance du difficile accès aux titres de l’Etat civil et l’existence d’une masse grandissante de citoyens sans papiers y compris des enfants dont la scolarité est stoppée et l’avenir compromis pour cause de non recensement ;

La persistance des plaies du passif humanitaire face à l’absence de tout signe de compassion et de volonté de vérité, justice et réconciliation ;

L’impunité accordée à des auteurs clairement identifiés de pratiques esclavagistes avérées ainsi que l’absence d’une politique vigoureuse de discrimination positive en faveur des victimes de ces pratiques et de leurs séquelles ;

Le maintien de la configuration de situations graves et flagrantes de discrimination et d’exclusion : (i) recrutement récent des élèves officiers et (ii) la composition des hautes sphères du commandement militaire, de l’administration territoriale, et des écoles d’excellence qui affichent sans gêne le visage hideux de l’exclusion et de la discrimination, sans oublier la présence plus que dérisoire de certaines composantes dans les médias radio et télévision ;

D’une façon générale les actes et les situations qui détruisent l’unité nationale restent figés et pire encore, sont l’objet de tentatives d’accentuation (comme le montre les récentes manœuvres consistant à opposer la revendication légitime du développement et de l’officialisation des langues nationales à l’usage du français, pour en fait renforcer l’exclusion) ;

Nous nous sommes, dès le début, gardé de contribuer à créer l’illusion que le changement de l’homme à la tête du système signifiait la solution aux problèmes les plus cruciaux et urgents des populations. Ce qui se passe après six mois, semble malheureusement confirmer que nous sommes en réalité dans une sorte de changement dans la continuité, tel que d’ailleurs le montre la persistance de la politique consistant à prendre les mêmes pour recommencer.

Nous appelons le pouvoir en place, à répondre aux espoirs suscités par le changement de l’homme à sa tête et à faire face à ses responsabilités devant la nécessité urgente d’apporter des solutions rapides aux revendications légitimes des populations, évoquées ci-dessus, pour les soulager de leurs souffrances qui n’ont que trop duré.

Nous demandons également au pouvoir de diligenter des enquêtes pour recouvrer les biens immenses détournés, alors que le peuple croupit dans la misère.

Malheureusement, face à cette situation, notre camp, celui de l’opposition, semble quelque peu dépassé et dispersé, pour pouvoir jouer efficacement son rôle d’orientation et d’appui aux populations dans leurs luttes légitimes face à ces nombreux problèmes. C’est donc pour nous l’occasion de lancer un appel pour une opposition forte et unie.

C’est dans la même logique que nous militants, cadres et dirigeants de l’Union des Forces de Progrès (UFP) restés fidèles à sa ligne et à ses idéaux hérités du MND et qui tentons, en vain, depuis plus de sept (7) ans, de le sauver de la liquidation par la direction déviationniste, qui a abandonné notre politique d’accumulation de forces et de conquête du pouvoir par la voie des urnes, réitérons notre ferme engagement à rester groupés pour continuer ensemble et avec vous la lutte pour :

Barrer le chemin à la destruction de notre parti, déjà très largement diminué par les résultats catastrophiques de notre politique d’abandon des préoccupations des masses opprimées et du boycott des élections de 2013 qui nous ont fait perdre 11 mairies dont aucune n’a pu être reconquise en 2018, tout comme nous n’avons pu obtenir que 3 députés au plus fort reste alors que nous avions pu en avoir 9 en 2007 et un résultat catastrophique de 2,4% à l’élection présidentielle, loin derrière le 4ème qui a affiché plus de 8% ;

S’opposer à la politique de refus de la pratique de la critique et de l’autocritique par la Direction de l’UFP, devant tant de faits indéniables d’échec, pour la remplacer par une politique de règlement de compte allant même jusqu’à se rendre complice de l’Administration dans le piétinement habituel des libertés démocratiques, en demandant à celle-ci d’interdire le meeting de la citoyenne et députée Kadiata Malick DIALLO ;

C’est ainsi, qu’à l’instar des nombreuses déclarations émises par la base pour s’opposer à la déviation de ligne et à la liquidation du Parti, nous appelons les militants à se démarquer de la mascarade de congrès que ne peuvent cacher les gesticulations démagogiques du groupe déviationniste qui tente, à travers l’organisation de conférences sur le MND, de se présenter comme fidèle à son héritage sans avoir fait au préalable son autocritique, pour avoir renié dans la pratique ces idéaux, allant même jusqu’à refuser toute référence à l’héritage du MND dans son programme de campagne, lors des élections municipales, législatives et régionales de 2018.

Nouakchott, le 08 Février 2020