Mauritanie : 6,74 milliards MRU pour le volet infrastructures du PPE
Afrimag - Le Programme Prioritaire Elargi (PPE) annoncé par le Président Mohamed Cheikh Ghazouani à la veille de la présentation de la Déclaration de politique générale par le nouveau Premier ministre, Mohamed Ould Bilal, le 02 août 2020, est élaboré pour être mis en œuvre en 30 mois.
C’est la version mauritanienne de ces «relances» économiques post-covid-19, avec 27,9% de l’enveloppe globale destinée au développement d’infrastructures de soutien à la croissance.
L’axe numéro un, intitulé «Développement d’infrastructures de soutien à la croissance», bénéficie d’un financement de 6,74 milliards MRU, soit 27,9% du financement global du PPE dont le coût est de 24.162 millions MRU et pour lequel des actions prioritaires sont envisagées au cours des trente (30) prochains mois.
Décliné en «sous axes», le développement d’infrastructures de soutien à la croissance» accorde une place de choix à la mobilité urbaine qu’il faudrait entendre comme la nécessité d’améliorer la circulation dans les grandes villes du pays, notamment Nouakchott et Nouadhibou. Ce sous axe bénéficie d’un financement conséquent de 2 976 millions MRU, 44,2% du montant alloué à l’axe numéro un.
Cette enveloppe sera consacrée à la mise en œuvre de projets d’infrastructures portant sur les constructions des deux ponts et de 70 km de voirie à Nouakchott (voies à l’intérieur de la ville et voieries rapides autour d’elle), en plus de la poursuite de l’exécution en cours de 40 km de voiries dans les quartiers périphériques de la capitale. Les grandes villes de l’intérieur bénéficient, dans le cadre du PPE, de la réalisation de 75 km de voiries.
Relooker le visage de la capitale Nouakchott passe aussi par les travaux de pavage en pierres de grands axes et places publiques, des espaces protégés pour les piétons (en cours d’exécution à Nouakchott), et l’aménagement et la mise en exploitation de parking payants à Nouakchott au profit des communes, comme indiqué dans le sous chapitre «Villes productives» auquel est consacrée une enveloppe de 802 millions MRU, soit 11,9% du financement de l’axe un.
Ce premier sous axe va de paire avec celui dit «Entretien et réparation des routes » pour lequel le PPE consacre 1 000 millions MRU (14,8%). Il s’agirait, note le document du Comité interministériel, de recréer une entreprise dont la mission est l’entretien routier, à l’image de ce que faisait la défunte ENER.
Le deuxième sous axe, en termes d’importance, ce sont les infrastructures rurales. Avec un financement de 1612 MRU (23,9%), il constitue, en quelque sorte, le pendant de ce qui est dédié au sous axe «villes» productives pour lequel le PPE consacre 802 millions MRU (11,9%).
Les investissements en faveur des infrastructures rurales sont ainsi une bonne action posée dans le sens de la diversification des activités économiques et du développement de l’arrière- pays qui concentre encore 48 % de la population, avec une estimation de 74 % des pauvres vivent dans les zones rurales.
Cette enveloppe sera consacrée à «l’accélération de l’électrification des zones de production (250 Km sur la vallée du fleuve), le désenclavement des zones de production, la réhabilitation des périmètres hydro-agricoles dégradés (2000 ha), la construction de 30 bassins de rétention des eaux pluviales, et le curage des affluents des zones humides (Kankossa, Mahmouda, Venjé, Lac d’Aleg, lac de Male, Kendelek, Tagthavet,…) ». Elle bénéficiera également à «la construction de barrages et seuils de ralentissement et le curage et re-calibrage de trois axes hydrauliques le long de la vallée.»
Le sous axe consacré aux infrastructures rurales vient à point nommé pour corriger peu ou proue des insuffisances notoires soulignées, en 2017, par le rapporteur spécial sur les droits de l’homme et l’extrême pauvreté dépêché en Mauritanie par l’Onu.
Deux secteurs essentiels avaient alors retenu l’attention : l’Accès à l’eau constitue un problème majeur et persistant. Il devrait bénéficier d’une bonne partie de l’allocation pour ce sous axe, tout comme la santé, l’éducation et la sécurité alimentaire qui, d’après l’enquête de suivi de la sécurité alimentaire réalisée en juillet 2015, par le PAM, concerne 26,8 %.
Idem pour la santé : «Les difficultés pour accéder aux installations de santé ont été citées à maintes reprises parmi les préoccupations majeures», notamment en zone rurale : dispensaire très éloigné ou fermé et personnel de santé rare font que «le taux de mortalité maternelle est parmi les plus élevés du monde : d’après le recensement de 2013, il s’élève à 582 décès pour 100 000 naissances vivantes».
Le taux – « accablant » – de mortalité en 2015 chez les enfants de moins de 5 ans est de 84,7 décès pour 1 000 naissances, alors que le plan d’action 2010-2015 prévoyait 45 pour 1 000.
Enfin, le sous axe, «Infrastructures numériques» se voit doter d’une enveloppe de 250 millions MRU, soit 3,7% du financement de l’axe 1. L’objectif de cette allocation est de «soutenir les actions portant sur le renforcement des réseaux de fibres optiques et l’accélération de la digitalisation de l’administration, à travers l’acquisition de solutions logicielles et d’équipements».
Le PPE vient en appoint à une stratégie de développement dont tous les indicateurs virent au rouge à cause de la pandémie du nouveau coronavirus (Covid-19).
Car la croissance ralentira en 2020 en raison de l’impact économique de la pandémie mondiale de coronavirus (Covid-19). L’ampleur de l’impact dépendra de la volatilité des prix des produits de base, du rythme de la reprise en Chine et en Europe (principaux partenaires commerciaux de la Mauritanie), de la propagation locale du virus, et des mesures de riposte prises par le gouvernement. Concernant ce dernier point, le PPE est une option de réactivité qu’il faut saluer d’autant que le financement est réalisé dans sa totalité sur budget de l’Etat.
Selon un scénario de base où les prix du pétrole diminueraient considérablement, avec la levée des mesures de distanciation sociale au bout des deux mois et une lente reprise de la croissance en Chine et en Europe, la croissance économique en Mauritanie devrait baisser pour atteindre 3,4 % en 2020.
Il y a tout de même une note d’espoir quand la Banque mondiale annonce que «’activité économique devrait rebondir en 2021-2022 grâce à une reprise des investissements directs étrangers (IDE) et à une augmentation de la production extractive.» Les craintes, elles, sont liées à l’hypothèse d’une «pandémie prolongée (qui) posera de plus grands risques, en réduisant les IDE, les exportations et en affectant la consommation locale.»
Par Mohamed Sneïba, Correspondant permanent - Nouakchott