RFI - C’est un mouvement difficilement contrôlable qui pousse des milliers de Mauritaniens vers le nord de la capitale. A 250 km de Nouakchott, la ruée vers l’or est devenue une réalité depuis un peu plus d’un mois. Le gouvernement a décidé de réglementer leur activité.
Dites « Tijiritt » et les yeux des jeunes Mauritaniens se mettent à briller. Comme l’or que des milliers d’entre eux espèrent trouver en partant vers le nord du pays. Ils seraient au moins 20 000, peut-être bien davantage, à avoir tout laissé sur place pour se précipiter dans cette région aurifère de la Mauritanie.
Payer la taxe pour chercher
Le mouvement a pris tant d’ampleur depuis à peine un mois que le gouvernement a décidé de réglementer leur activité. Selon le directeur général des mines de Mauritanie, Ahmed Ould Taleb Mohamed, « l’Etat a décidé d’agir face à la ruée des citoyens […] pour en limiter les risques et pour protéger les domaines accordés par licences à des sociétés étrangères ».
Ces dernières ne voient pas en effet d’un très bon œil ces milliers de jeunes se précipiter aux abords de leurs concessions. Des géants du secteur minier, comme les Canadiens Kinross Gold Corporation (cinquième producteur mondial de métal jaune) et First Quantum qui opèrent dans la zone de Tasiast, n’ont pu que constater ces dernières semaines l’afflux de nombreux orpailleurs venus tenter leur chance, « en toute clandestinité ».
Le gouvernement mauritanien a donc décidé de délivrer des licences et, en attendant leur attribution, les orpailleurs déjà installés sur place ont été priés manu militari de déguerpir. Le fameux permis ne sera accordé qu’aux citoyens mauritaniens, détenteurs d’un détecteur de métal dûment dédouané.
Le prix des détecteurs flambe
L’orpailleur candidat devra enfin s’acquitter d’une taxe de 100 000 ouguiyas (250 euros). Il ne pourra de plus vendre le produit de ses fouilles qu’aux « structures étatiques désignées à cet effet pour éviter les sanctions prévues ». Des sanctions qui iraient de la confiscation du matériel de détection, aux amendes et jusqu’à des peines d’emprisonnement. Une fois remplies toutes ces conditions, le mineur sera autorisé à exercer son activité pour quatre mois seulement.
Les conditions restrictives n’ont pas fait retomber la fièvre de l’or. Selon les chiffres officiels, ils étaient 16 000 Mauritaniens à s’être mis sur les rangs pour obtenir une licence dès l’ouverture des attributions, le 25 avril. Premier effet mesurable de cette régularisation, le prix des détecteurs de métaux est passé de moins de 200 euros à plus de 4 000 euros sur le marché local, a constaté sur place l’Agence France-Presse.
« Il suffit de se baisser »…
Les réseaux sociaux ne sont pas étrangers à cette ruée. Certains tweets affirment même qu’il suffit de se baisser pour trouver de l’or. On peut être sceptique, mais toujours est-il qu’ils sont des milliers à y croire. Certains ont tout vendu, rapporte le site Maghreb Émergent. « Voitures, maisons et même commerces » ont été cédés alors que d’autres « avaient recours au financement participatif ; six personnes ont ainsi réuni 2 000 dollars pour assurer un départ vers l’or », assure le site.
A tous ceux qui se seront mis en règle, les autorités ont finalement octroyé un territoire de 1 800 km2 aux abords de celui qu’exploite Kincross, pour tenter d’étancher leur soif du précieux minerai. En 2014, la mine a produit 260 045 onces d’or contre 247 818 onces en 2013. Le 1er mai 2016, l'once d'or cotait 1 293 dollars...
Après des années de déficit, Kincross prévoit d’investir 300 millions de dollars pour agrandir sa mine de Tasiast avec la perspective d’augmenter sa production jusqu’à 400 000 onces en 2018 et réduire les coûts d’exploitation. Tout à côté, à l’ombre de ce colosse, les petits chercheurs d’or à « permis » conservent malgré tout l’espoir de faire, à leur tour, bonne fortune.