Le Brésilien Raffael. INA FASSBENDER / AFP
Texte par :Farid AchacheSuivre
Samedi 16 mai, les joueurs du Championnat d'Allemagne (Bundesliga) vont reprendre la Bundesliga avec des conditions particulières, après plusieurs semaines d'arrêt à cause du coronavirus. Les enceintes seront à huis clos, il sera par exemple interdit de se serrer la main entre joueurs.
La Ligue allemande de football (DFL) a présenté aux pouvoirs publics un document de 51 pages, qui a convaincu le gouvernement fédéral et les régions de la possibilité de relancer le football. Entre autres, les buts ne seront pas célébrés et le port du masque sera obligatoire pour l'encadrement et les remplaçants. Les spectateurs ne seront pas présents dans le tribunes.
Depuis deux mois il a fallu s'adapter
« C’est moins passionnant de jouer à huis clos, on n’a pas la même motivation, on dirait un entraînement, mais c’est pour la sécurité de tous », confie à RFI l’attaquant brésilien Raffael qui évolue au Borussia Mönchengladbach, quatrième de Bundesliga actuellement.
« L'émotion n'est pas morte ! On peut créer des émotions sans s'embrasser, sans se parler. Simplement par une attitude, un comportement rayonnant. Quand on est passionné, quand on a une émotion positive, on sait se l'approprier. Les joueurs l'auront aisément », fait valoir à l’AFP Denis Troch, ancien entraîneur d'Amiens devenu coach mental.
Depuis la reprise de l'entraînement en avril, les choses ont évolué au fur et à mesure. Toutes les équipes ont été contraintes de revoir leur routine, il a fallu s’adapter.
« Au début on s’est entraîné deux par deux. Ensuite, nous avons travaillé par groupe de cinq avant de reprendre des séances de travail plus normales à 10 avec deux groupes par jour en prenant toujours un maximum de précautions. Mais il y a eu des contacts, car c’est impossible de jouer au foot sans contacts. Nous avons tous été testés », raconte Raffael, natif de Fortaleza (nord du Brésil), qui compte treize saisons en Bundesliga.
Mise en œuvre massive de tests de coronavirus
Le pilier du plan de la DFL est la mise en œuvre massive de tests de coronavirus pour les joueurs et leur encadrement, deux fois par semaine minimum et à la veille de chaque match, et la mise à l'écart immédiate au sein des clubs de toute personne déclarée positive.
« Ici en Allemagne la situation était moins grave que dans d’autres pays et la pandémie a été assez contrôlée, explique Raffael. Mais nous devons faire très attention car le virus existe encore. Nous sommes habitués en tant que Brésiliens à avoir beaucoup de contacts avec nos amis. On a dû changer nos habitudes. » En effet, dans leur vie privée, les joueurs sont désormais priés de vivre en quasi-quarantaine, sans contacts avec leurs voisins, et sans recevoir de visites. Ces restrictions s'appliquent aussi à tous les membres du foyer.
En cas de détection d’un cas positif au Covid-19, la décision de placer en quarantaine une équipe entière ne dépend pas des clubs, mais des autorités locales de santé. En Allemagne, Etat fédéral, chaque région adopte sa propre politique de prévention, ce qui explique que l'équipe de Dresde (D2) ait été placée en quarantaine après la détection de deux cas, alors que celle de Mönchengladbach, dans la même situation, a pu continuer l’entrainement.
Environ 300 personnes impliquées dans la rencontre seront admises au stade les jours de match, mais divisées en trois zones qui ne doivent avoir aucun contact entre elles. Au-delà, la surveillance est de la responsabilité de la police, notamment en cas de rassemblements de supporters.
Des dommages irréversibles en cas de maladie ?
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Malgré le protocole sanitaire draconien prévu pour la reprise de la Bundesliga, les joueurs pourraient cependant s'exposer à des lésions pulmonaires « irréversibles » en cas d'infection au coronavirus, avec un risque de déclin des performances, explique à l'AFP un médecin du sport réputé en Allemagne.
Le professeur Wilhelm Bloch, de l'École Supérieur du Sport de Cologne, s'inquiète des conditions de ce retour au terrain malgré les consignes sanitaires, jugeant le protocole de la Ligue allemande (DFL) « pas sûr à 100% ». « Les joueurs ne sont pas en quarantaine totale, ils côtoient leurs familles, même s'ils ont reçu des consignes pour limiter les contacts. Et il y a aussi les risques pendant les matches. Ils seront tous testés, mais les tests de coronavirus ne fonctionnent pas tous parfaitement, il y a une marge d'erreur relativement importante », indique Wilhelm Bloch.
« Nous ne savons pas pour le moment si une infection mineure ou des symptômes mêmes légers ne provoquent pas des dégâts, comme par exemple de petites cicatrisations des poumons après une inflammation, ou la formation de tissu conjonctif, c'est à dire une fibrose. Ces dommages peuvent être irréversibles, ou peuvent perdurer très longtemps avant que le corps ne les répare », avance Wilhelm Bloch qui pointe aussi le danger d’une préparation pas assez « optimale ».
Loin de son pays natal, Raffael va reprendre son métier dans des conditions très particulières, tout en s’inquiétant pour sa famille et ses proches. « Je suis triste de la situation au Brésil et des mauvaises nouvelles qui arrivent chaque jour, dit-il. Les gouvernants se chamaillent au lieu de prendre le problème à bras le corps. C’est préoccupant, car le système de santé n’est pas très développé dans une grande partie du pays. »
Propos de Raffael recueillis par Marco Martins,