Automobile: pourquoi Renault joue sa survie

mar, 26/05/2020 - 11:19

Le siège de Renault à Boulogne Billancourt près de Paris, le 24 Janvier 2019. Photo: Eric Piermont/AFP

Par :Dominique Baillard

Le président Macron annonce ce mardi après-midi son plan de relance du marché automobile. Un coup de pouce bienvenu pour toute l’industrie et en particulier pour la première victime du coronavirus, le Français Renault.

L’entreprise était au bord de la faillite il y a quelques jours, en panne sèche de liquidités pour payer ses fournisseurs et les salaires. Elle a donc demandé l’aide de l’État, son actionnaire. Elle joue en ce moment sa survie selon Bruno Le Maire. En réalité, même si les négociations entre le gouvernement et la firme au losange se poursuivent, le principe de la garantie de l’État est dorénavant acquis pour un prêt de 5 milliards d’euros, l’urgence est donc ailleurs. Renault doit maintenant colmater les brèches ouvertes bien avant la pandémie. 141 milliards d’euros de pertes en 2019, son annus horribilis selon Arnaud Aymé, expert des transports associé chez Sia Partners. C’est la facture du feuilleton Carlos Ghosn. Depuis novembre 2018, l’entreprise navigue à vue, plus occupée à gérer les problèmes de gouvernance posés par l’arrestation de son patron charismatique qu’à gérer le sort de ses usines qui tournent au ralenti. Après la course à la taille des années Carlos Ghosn, place à la rationalisation des coûts, c'est l'objet du plan d'économies de 2 milliards d'euros qui sera connu jeudi ou vendredi.

La course au volume est un échec ?

Pour rentabiliser les coûts fixes qui sont très lourds dans cette industrie, c’est indispensable de voir grand. C’est d’ailleurs pour voir grand que PSA veut se marier avec Fiat Chrysler. La stratégie choisie par Carlos Ghosn était donc tout à fait légitime selon Arnaud Aymé. Mais ce pari gagnant en 2017 et 2018, quand Renault Nissan Mitsubishi portaient la couronne de premier constructeur mondial, s’est transformé en piège lorsque le marché automobile s’est retourné en 2019. Renault doit donc faire la chasse aux coûts pour rester compétitif, comme l'a fait son partenaire Nissan, ou son concurrent français PSA. Pour diminuer les frais fixes, il faut réduire le nombre de modèle, revoir la taille des usines surcapacitaires, voire fermer les sites les plus petits, les moins productifs. Comme les trois usines françaises citées dans la presse ces derniers jours.

Le soutien à l’automobile qui sera annoncé devrait faire la part belle à la voiture électrique, à condition de maintenir l'emploi sur place

Cela tombe bien pour Renault, le constructeur a été l’un des premiers à miser sur cette révolution automobile. Sa Zoé est la voiture électrique la plus vendue en France. Et Renault a choisi de concentrer la production des modèles électriques en France, sur le site de Douai. Un choix en phase avec la souveraineté industrielle chère au président Macron, même s'il a été fait bien antérieur au déclenchement de la pandémie. En revanche pas question de ramener la fabrication de la Clio en France, un non-sens sur le plan économique. Et puis sous la pression du gouvernement, Renault va finalement entrer dans l’alliance pour l’Airbus des batteries. Cette initiative prise pour doter l'Europe de cette industrie clé pour la voiture électrique a été jusqu'à maintenant écartée par Renault. Entre autre parce que ses partenaires japonais n’ont aucun intérêt à voir émerger un champion européen de la batterie, un marché aujourd’hui dominé par la Chine, la Corée du Sud …. Et le Japon. L’alliance est encore un mécano subtil et surtout encore loin d’avoir concrétisé sa vocation : renforcer ses membres. Renault va devoir aussi revoir ses relations avec les constructeurs de l'alliance pour gagner en performance, ce sera la priorité de Luca de Meo le prochain directeur du groupe qui doit arriver le premier juillet.

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►En bref

En France, l’État se dote d’un fonds pour soutenir ses fleurons

Son nom : le lac d’argent. Il sera doté au départ de 4,2 milliards d’euros. Sa fonction : investir dans les grandes entreprises tricolores cotées afin de renforcer et de protéger leur capital. Il est présenté ce mardi par BPI France, la banque public d’investissement.