Voilà deux semaines que le Liban s'est doté d'un gouvernement dit de « technocrates pour faire face à la crise, inédite depuis la guerre civile. Crise politique avec des manifestants qui depuis la mi-octobre demandent la fin d'un système jugé corrompu. Crise économique et financière qualifiée de « catastrophe » par le nouveau Premier ministre Hassan Diab. Les banques, devenues des cibles pour les manifestants à cause des nombreuses restrictions imposées doivent retrouver la confiance des déposants.
Des établissements attaqués. D'autres, investis pour des sit-in improvisés. Il faut dire que la patience des Libanais a été rudement mise à l'épreuve avec des attentes interminables jour après jour pour pouvoir retirer une somme limitée... en moyenne 200 dollars maximums par semaine, et l'impossibilité de transférer de l'argent à l'étranger. La confiance n'est plus vraiment au rendez-vous. Face à la pénurie de dollars, les Libanais s'imaginent le pire. Pour rétablir la confiance perdue et éviter la panique, le nouveau gouvernement travaille à mieux encadrer les mesures de restrictions imposées par les banques, des mesures informelles jusqu'ici, anticonstitutionnelles disent même les manifestants.
Quel genre de mesures les autorités pourraient-elles prendre ?
La stratégie qui sera peut-être dévoilée dès cette semaine est menée conjointement par le gouvernement et les représentants du secteur bancaire. D'après la presse locale, il s'agirait de relever nettement les plafonds mensuels de retraits en livres, la monnaie nationale, mais aussi les plafonds des transferts à l'étranger qui handicapent tellement de Libanais désireux d'envoyer de l'argent à un parent hors du pays. Des restrictions qui handicapent aussi bien sûr les importateurs et les entreprises en général.
Plusieurs banques ont été assignées en justice depuis le mois de novembre par des clients lésés.
Le gouvernement devrait légitimer ces mesures en les inscrivant dans la loi. Il espère que cela suffira à stabiliser la situation, marquée notamment par de grosses fluctuations des taux de change. Si le taux officiel n'a pas bougé, 1 dollar s'échange désormais contre plus de 2000 livres chez les changeurs.
Le gouverneur de la Banque centrale libanaise a aussi dénoncé un climat propice à saper la confiance
Interrogé par nos confrères de France 24 jeudi dernier, Riad Salamé a fustigé des rumeurs qui visent les banques au Liban (à un rythme hebdomadaire selon lui ).
Néanmoins, cette figure vilipendée par les manifestants a reconnu aussi que pour retrouver la confiance, il fallait également instaurer plus de transparence. Il a assuré qu'une enquête fouillée serait menée pour traquer un milliard de dollars qui ont disparu des banques libanaises à l'étranger depuis le début de la contestation. Une information déjà révélée par la presse locale il y a quelques semaines.
Entre temps, le budget libanais a été voté dans les temps, mais dans des conditions contestées, en l'absence de nombreux députés ce qui a suscité la protestation des manifestants. Preuve que la défiance vis-à-vis des autorités est toujours bien là.
Un budget donc, mais on ne décèle pas encore le programme économique de ce gouvernement
C'est un gouvernement de crise qui a des pouvoirs limités, car contraint par le système politico-confessionnel en place. Fera-t-il appel au FMI et à ses recettes austères ? Non, a répondu le gouvernement qui accueillait pourtant un responsable de l'institution financière il y a quelques jours.
La solution du « haircut » redouté par les manifestants depuis le début sera-t-elle bientôt annoncée ? Elle consiste -on le rappelle- à ponctionner les dépôts en convertissant les comptes en dollars en livres libanaises. Inconcevable pour les Libanais qui craignent de voir les plus pauvres payer la facture. Pas de trace pour l’heure des réformes structurelles pour assainir les finances, combattre la corruption, réclamées par les manifestants et la communauté internationale qui y conditionne son soutien. Le nouveau chef du gouvernement Hassan Diab a demandé du temps à ses concitoyens.
Cette crise bancaire a des répercussions au-delà du Liban
La Syrie voisine dont le système financier est imbriqué dans le circuit libanais la subit de plein fouet. Déjà lourdement affectée par la guerre, la livre syrienne a dégringolé depuis le début de la crise bancaire. Le Liban étant la porte d'accès première des Syriens aux billets verts, surtout depuis l'instauration des sanctions contre le régime Assad, des sanctions amenées à se durcir encore cette année.
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